Ne fermez pas les yeux sur le trouble du comportement en sommeil paradoxal (TCSP)!

Quand les rêves deviennent des actions, comment reconnaître le trouble du comportement en sommeil paradoxal?

Le rêve est une activité mentale qui, normalement, ne se traduit pas par des comportements. Qu’arrive-t-il dans le cas contraire?

Chez les personnes atteintes du le trouble du comportement en sommeil paradoxal (TCSP), le mécanisme cérébral qui nous empêche de bouger pendant le stade de sommeil paradoxal est altéré, ce qui rend les mouvements et les comportements possibles. Ce stade du sommeil est dit paradoxal, car pendant que le corps est bien endormi et temporairement paralysé en majeure partie, l’activité mentale, au contraire, est intense avec des rêves élaborés. Sans ce « verrou » protecteur qui nous garde inactifs pendant ce stade de sommeil, les personnes qui souffrent du TCSP peuvent s’agiter et agir le contenu de leurs rêves.

Comme les personnes atteintes présentent un tonus musculaire anormal lié à l’absence de paralysie au cours du sommeil paradoxal, elles peuvent bouger tout leur corps, parler (somniloquie), rire, marcher, agripper, frapper, se redresser et même se lever pendant qu’elles dorment et rêvent. Le TCSP n’est pas la façon idéale de réaliser ses « rêves »! Les comportements caractéristiques du TCSP reflètent habituellement ce que sont les rêves : souvent illogiques, chargés d’émotions et une version altérée de notre réalité. De plus, les comportements du TCSP sont souvent le miroir de nos rêves typiques : poursuites, accès d’agressivité, sentiment de menace, activités sexuelles débridées, etc. (Pour en savoir plus sur les rêves, consultez « Le pourquoi et le comment des rêves ».) Des comportements vigoureux, voire violents, peuvent se manifester occasionnellement ou souvent, une ou plusieurs fois par nuit.

La mise en acte des rêves se produit généralement dans la deuxième moitié de la nuit, peu avant le réveil, quand le sommeil paradoxal dure le plus longtemps. Même si une personne semble agressive pendant les épisodes de TCSP, elle n’affichera pas pour autant de comportements agressifs au cours de la journée.

Le TCSP est un trouble du sommeil impressionnant, mais rare et qui affecte moins d’un pourcent de la population (environ 0,5 %). La majorité est des hommes de plus de 50 ans. Les femmes aussi peuvent en être atteintes et dans de rares cas des personnes plus jeunes. Le TCSP apparaît en général graduellement et peut s’aggraver avec l’âge.

Les personnes atteintes de TCSP cherchent souvent de l’aide quand leurs comportements nocturnes sont violents ou dangereux pour eux ou pour leur partenaire de lit. Un autre moyen de reconnaître la maladie est d’écouter la personne atteinte et son entourage expliquer comment ils réagissent face à ce sommeil agité et aux comportements associés aux rêves. Habituellement, un système de protection est mis en place pour éviter que quiconque ne se blesse accidentellement.

Que faire ou ne pas faire?

Le TCSP est un trouble neurologique généralement traité avec succès. Il peut aussi constituer un indicateur précoce de la maladie de Parkinson, une maladie neurodégénérative.

Voilà deux bonnes raisons de ne pas laisser la honte ou l’embarras vous empêcher de consulter ! Votre médecin ou un autre professionnel de la santé expert en sommeil pourra vous aider à obtenir le traitement approprié le plus tôt possible.

Le diagnostic du TCSP se base sur l’étude de votre sommeil, sur un examen médical incluant la vérification de vos médicaments et sur un compte rendu votre partenaire de lit.

L’étude du sommeil est importante pour établir un diagnostic différentiel (type de diagnostic visant à éliminer les autres causes possibles) et exclure d’autres troubles du sommeil tels que le somnambulisme. Il s’agit d’une combinaison de mesures subjectives et objectives du sommeil effectuées dans une clinique du sommeil par des professionnels du sommeil. Elle peut consister à remplir des questionnaires, à tenir un journal de sommeil et à évaluer la qualité globale du sommeil avec divers tests physiologiques.

La qualité et l’architecture de votre sommeil seront analysées au moyen d’un polysomnogramme (PSG). Cet examen indolore consiste à placer plusieurs électrodes sur votre peau afin de mesurer les activités électriques du cerveau et des muscles pendant votre sommeil. Les études du sommeil servent aussi à évaluer les fonctions respiratoires et pulmonaires, car les résultats peuvent expliquer plusieurs symptômes diurnes associés au sommeil de mauvaise qualité. Pour ce faire, la fréquence respiratoire et le niveau d’oxygène sont enregistrés à l’aide d’une canule nasale, d’une ceinture d’effort placée sur la poitrine et l’abdomen, et d’un capteur fixé au bout d’un de vos doigts, par exemple.

Le TCSP et le somnambulisme sont souvent confondus, car, dans les deux cas, la personne peut marcher, bouger et parler pendant son sommeil. Une différence importante est que les épisodes de somnambulisme se passent en sommeil profond et non en sommeil paradoxal comme le TCSP. Ceci explique pourquoi l’enregistrement PSG est important afin d’établir le bon diagnostic. Une autre différence est que le somnambulisme débute généralement durant l’enfance et diminue en prenant de l’âge, alors que TCSP apparaît chez les adultes, particulièrement les hommes, d’une cinquantaine d’années.

Pour de plus amples informations sur l’étude du sommeil, nous vous invitons à consulter le guide pour les patients de la Société canadienne du sommeil (SCS) : https://scs-css.ca/ressources/brochures/guide-patient

Les interventions et les traitements pharmacologiques sont axés sur la prévention des blessures et le contrôle ou l’élimination des symptômes.

Généralement alertes, les personnes atteintes de TCSP ne sont pas confuses ou désorientées lorsqu’elles se réveillent pendant un épisode. On peut donc essayer de les réveiller pour mettre fin à l’épisode, notamment pour des raisons de sécurité. Si vous assistez à un accès de violence lié au TCSP, assurez-vous que la personne endormie ne se fasse pas mal, et ne blesse personne. La sécurité doit passer avant toute chose.

Pour prévenir les blessures, il est utile de rendre la chambre à coucher aussi sûre que possible. Selon la gravité du problème, les mesures de précaution suivantes devraient être considérées :

  • Retirer tous les objets tranchants, cassables ou dangereux, notamment les armes;
  • Installer des barrières latérales au lit;
  • Placer un revêtement de sol rembourré près du lit, éloigner les meubles et les objets qui trainent ou installer un rembourrage sur les arêtes des meubles;
  • Protéger les fenêtres;
  • Demander au partenaire de lit de dormir dans un autre lit ou même dans une autre chambre, au moins jusqu’à ce que les symptômes soient maîtrisés.

En ce qui concerne les médicaments, il existe un large éventail d’options pharmacologiques, en particulier les benzodiazépines qui ralentissent le système nerveux. Les suppléments de mélatonine sont de plus en plus utilisés car ils entraînent moins d’effets secondaires que les benzodiazépines et ils aident à prendre en charge les comportements violents. Cela dit, même si la mélatonine est vendue sans ordonnance, un médecin doit superviser son utilisation dans ce contexte précis.

Quelles sont les causes du TCSP?

Bien que les mécanismes exacts à l’origine du trouble ne soient pas encore complètement élucidés, des données récentes semblent indiquer un dysfonctionnement d’une partie du tronc cérébral, qui intervient dans la paralysie musculaire du sommeil paradoxal et dans le contrôle des mouvements (le « verrou » mentionné ci-haut).

Le TCSP peut se présenter avec les troubles suivants :

  • Troubles neurodégénératifs, comme la maladie de Parkinson (MP) ou la démence à corps de Lewy. Il semble que le TCSP puisse se manifester plusieurs années avant que le diagnostic de la MP ne soit posé, ce qui peut favoriser le dépistage précoce de la MP. Cependant, il n’existe pas encore de médicament qui permette de ralentir la progression de la MP.
  • D’autres troubles neurologiques comme l’épilepsie, les tumeurs cérébrales, la sclérose en plaques, le syndrome de Guillain-Barré et les accidents vasculaires cérébraux.
  • D’autres troubles du sommeil, tels que la narcolepsie ou mouvements périodiques des membres pendant le sommeil (MPMS).
  • À la prise de médicaments, par exemple certains antidépresseurs, ou au sevrage de médicaments sur ordonnance (ou de drogues illicites).

Quelles sont les répercussions du TCSP?

Le TCSP perturbe le calme et l’état de paix que le sommeil devrait procurer aux dormeurs, aux partenaires de lit et à tous ceux qui vivent sous le même toit.

À cause de leurs comportements nocturnes, les blessures involontaires ne sont pas rares et constituent une source de détresse, tant pour le dormeur atteint du TCSP que pour son entourage.

L’heure du coucher peut devenir un moment redouté. Les personnes concernées peuvent finir par présenter des symptômes d’insomnie et les manifestations habituelles de fatigue et de somnolence diurnes.

La bonne nouvelle en ce qui concerne ce trouble du sommeil est que des traitements efficaces existent! Si vous êtes touché, sachez que vous pouvez retrouver des nuits de sommeil satisfaisantes, réparatrices et sans danger. N’attendez plus et consultez.

* SOMNOLENCE VERSUS FATIGUE
La somnolence est l’envie ou le besoin, difficilement répressible, de dormir pendant la journée. Il ne faut pas la confondre avec la fatigue, c’est-à-dire une sensation d’épuisement physique ou mentale qui incite à se reposer, sans toutefois se traduire par un sommeil involontaire ou une envie excessive de dormir. Les gens fatigués peuvent combattre sans grandes difficultés le sommeil pendant la journée. Par contre, les gens somnolents sont pour ainsi dire envahis par le sommeil : ils peuvent tomber endormis en classe, au travail ou en conduisant, par exemple. La somnolence n’est pas un état normal. Elle est associée à une perte ou à une mauvaise qualité de sommeil aiguë (privation de sommeil) ou chronique. Il s’agit d’un symptôme important de certains troubles du sommeil, mais aussi de certains problèmes médicaux ou psychologiques. Ne fermez pas l’œil sur la somnolence!